Résumé :
Comme dans tous les pays du monde, la politique monétaire s’inscrit dans le cadre de la politique économique sous ses divers aspects, sachant que son ultime objectif est de réaliser le carré magique : stabilité des prix, croissance maximum, plein emploi et l’équilibre de la balance des paiements. Parmi les principaux objectifs attribués à la politique monétaire, celui de la régulation de la quantité de monnaie mise en circulation ainsi que sa vitesse (stabilité des prix) en est, d’après nous, le plus prioritaire.
Suite au retard accusé par certains pays en voie de développement aux plans plan financier et bancaire, rajouté à la gestion centralisée et le laxiste des politiques macroéconomique, l’objectif du contrôle de la stabilité des prix n’a pas été atteint, d’où le recours de ces pays aux plans de sauvetage que préconise le FMI sous l’intitulé de réforme des politiques monétaires, ce qui a est le cas de l’Algérie durant la période de gestion centralisée, où le rôle de la politique monétaire fût à la fois réduit et laxiste.
Pour cela, nous tenterons dans cet article d’analyser la problématique de l’adéquation des instruments de la politique monétaire, mise en œuvre par les autorités monétaires algériennes durant les deux dernières décennies, avec les objectifs économiques tracés par le gouvernement.
Pour ce faire, nous exposerons, au cours de ce présent travail, la conduite de la politique monétaire, c’est-à-dire nous allons mettre en évidence les différentes politiques monétaires appliquées en Algérie au cours des deux dernières décennies, en allant de la phase de la gestion centralisée (1962-1990), à la phase de transition (1990-2000) et enfin à la phase d’économie de marché (2001-2011). Nous tenterons de mettre le point sur la cohérence des objectifs préalablement tracés par l’autorité monétaire et leur réalisation, toute en mettant en exergue leurs conséquences au niveau de la sphère monétaire (le contrôle de la croissance des agrégats monétaires, le taux d’inflation, et le taux de change) ainsi qu’au niveau de la sphère réelle.
Abstract:
As in all countries of the world, monetary policy is part of economic policy in its various aspects, knowing that its ultimate goal is to achieve the magic square: price stability, maximum growth, full employment and equilibrium of the balance of payments. Among the main objectives assigned to monetary policy, that of regulating the quantity of money circulating and its speed (price stability) is, according to us, the highest priority.
Following the delay by some developing countries with financial and banking plans, added to the centralized management and lax macroeconomic policies, the objective of controlling price stability was not achieved. So these countries have used the rescue plans promoted by the IMF under the heading of reform of monetary policy, which is the case of Algeria during the centralized management period, where the role of monetary policy was reduced and lax.
For this, we will attempt in this article to analyze the problematic of the adequacy of the instruments of monetary policy implemented by the Algerian monetary authorities over the past two decades, with economic objectives set by the government.
To do this, we will expose, in this present work, the conduct of monetary policy, that is to say, we will highlight the different monetary policies applied in Algeria in the past two decades, going from the centralized management phase (1962-1990), the transition phase (1990-2000) and finally to the market economy phase (2001-2011). We try to put in evidence the coherence of the objectives previously outlined by the monetary authority and their realization, all highlighting their consequences for the monetary sphere (control of the growth of monetary aggregates, inflation and the exchange rate) and the level of the real economy.
الملخص:
السياسة النقدية هي جزء من السياسة الاقتصادية في جوانبها المختلفة بالنظر إلى أن هدفها النهائي هو تحقيق المربع السحري: استقرار الأسعار، النمو الاقتصادي، تخفيض نسبة البطالة وتوازن ميزان المدفوعات. والهدف المخصص للسياسة النقدية، تنظيم كمية النقود المتداولة وسرعتها (استقرار الأسعار).
نظرا لتأخر بعض الدول النامية في المجال المصرفي والخطة المالية، وفي الإدارة المركزية وتراخي السياسات الاقتصادية الكلية، لم تتمكن من تحقيق هدف استقرار الأسعار، ولهذا التجأت هذه الدول إلى طلب المساعدة من صندوق النقد الدولي لإصلاح السياسة النقدية، والذي هو حالة الجزائر خاصة خلال فترة الإدارة المركزية. سنحاول تسليط الضوء على السياسات النقدية المختلفة التي تطبقها الجزائر في العقدين الماضيين، بدءا من مرحلة الإدارة المركزية (1962-1990)، المرحلة الانتقالية (1990-2000)، اقتصاد السوق وأخيرا مرحلة اقتصاد السوق (2001-2011).
Introduction
Dans une économie de marché, la régulation de la quantité de monnaie mise en circulation ainsi que sa vitesse est essentiel[1]. Pour ce faire, les banques centrales, qui ont la capacité de faire varier la quantité de monnaie en circulation, jouent un rôle très important, en agissant essentiellement soit sur la quantité de monnaie en circulation ou bien sur sa vitesse de circulation ou encore sur les deux variables en même temps, ce qui leur permet de maintenir la stabilité des prix des produits sur le marché. En assurant le maintien et la stabilité des prix, l’inflation sera à son tour limitée et les conditions requises d’une croissance économiques optimale seront partiellement assurées, sachant que le maintien d’un taux d’inflation vital contribue énormément à l’absorption du chômage et la réalisation d’une croissance économique appréciable. A cet effet, la mise en œuvre d’une politique monétaire est nécessaire.
Comme dans tous les pays du monde, la politique monétaire s’inscrit dans le cadre de la politique économique sous ses divers aspects (politique budgétaire, politique des revenus…), sachant que l’objectif ultime de toute politique économique est de réaliser ce qu’on appelle le « carré magique » à savoir : stabilité des prix, croissance maximum, plein emploi et l’équilibre de la balance des paiements[2]. A la politique monétaire a été attribué un l’objectif final qui est celui du contrôle et stabilité des variables monétaires ; c’est-à-dire réduction de l’inflation et préservation du pouvoir d’achat de la monnaie. Cet objectif ne peut être atteint directement ; pour cela, les autorités monétaires se fixent des objectifs dits « intermédiaires » qui sont des indicateurs maitrisables et qui sont principalement la stabilité du taux de change ainsi que le contrôle de la masse monétaire dont le contrôle peut contribuer à limiter la dérive des prix.
La politique monétaire adoptée à la fin de la deuxième guerre mondiale par les grands pays industrialisés est caractérisée par sa conception keynésienne qui contribue à alimenter une demande excessive des biens et services susceptibles de maintenir les conditions d’une croissance optimale. Inversement, la mission des autorités monétaires s’est recentrée, au cours des années quatre-vingts, sur l’objectif de stabilité des prix, instaurant ainsi une politique monétaire d’inspiration monétariste. En conservant les même principes de la politique monétaire (la stabilité des prix, la croissance économique, le plein emploi), le Fond Monétaire International (FMI) définit les réformes des politiques monétaires proposées aux pays qui sollicitent son aide sous formes d’émission restrictives de monnaie proportionnelle à l’évolution de la production. Le recours constant des pays aux plans de sauvetage que préconise le FMI, est dû généralement à une gestion centralisée et laxiste des politiques macroéconomique et aux retards qu’ils éprouvent sur le plan financier et bancaire, ce qui a est le cas de l’Algérie durant la période de gestion centralisée, où le rôle de la politique monétaire fût à la fois réduit et laxiste.
Depuis 1970, l’Algérie a opté pour un modèle de croissance basé sur la planification centralisée et le développement de l’industrie lourde. Les inconvénients de ce modèle de plus en plus ressentis, se traduisant par des surcoûts systémiques, une politique de crédit laxiste, inflation et développement du marché parallèle, les carences du système sont devenues insoutenables. Et A partir de cette année, les autorités politiques algériennes ont décidé de confier aux banques la gestion et le contrôle des opérations financières des entreprises publiques. Cette nouvelle vocation attribuée au système bancaire par les autorités politiques algériennes a impliqué l’ensemble des structures financières, ce qui les a obligées à se réorganiser en conséquence afin de remplir leur rôle en matière de conduite de la politique monétaire du pays.
Avec le choc pétrolier de 1986, l’Algérie a connu le début de remise en cause du système de gestion centralisé de son économie. Désormais, il fallait préparer les assises et les mécanismes nécessaires pour le passage à un système économique adéquat à l’ère de la mondialisation. Avec la promulgation de la loi 90-10 relative à la monnaie et au crédit (LMC) en 1990, l’Algérie a rompu avec l’économie planifiée et a vu le début de la transition vers l’économie de marché. Cette loi a nécessité d’importants aménagements en matière d’organisation et fonctionnement du système bancaire dont l’objectif consiste désormais à réinjecter les règles de l’économie de marché et le rétablissement de la solvabilité des entreprises d’Etat et des banques, et plus généralement le financement de l’économie. Au cours du début des années 2000, des aménagements ont été apportés à la LMC tel que l’ordonnancement de 2001 et celle de 2003.
En s’interrogeant sur la conduite de la politique monétaires et les résultats réalisés durant les deux dernières décennies des années 2000, nous avons formulé notre question principale de la manière suivante : les instruments de la politique monétaire mise en œuvre par les autorités monétaires algériennes durant les deux dernières décennies des années 2000 sont-ils adéquats avec les objectifs économiques tracés par le gouvernement ?
- Les fondements théoriques de la politique monétaire
La politique monétaire est probablement l’instrument de la politique économique qui a le plus évolué au cours de ces dernières années. Elle a donné lieu à un grand nombre de remises en causes quant à son rôle ; son efficacité, ses moyens et sa définition même. Ces remises en causes sont à la fois d’ordre théorique et empirique. L’objectif de ce point consiste à comprendre l’aspect théorique de la monnaie et son rôle en matière de planification et de relance de l’économie. Nous l’avons prévu, afin que nous puissions par la suite comprendre le prochain point qui consiste en le rôle de ces théories dans la formulation de la conduite de la politique monétaire en Algérie.
« La monnaie est un instrument de paiement spécialisé et accepté de façon générale par les membres d’une communauté en règlement d’un achat, d’une prestation ou le remboursement de crédit. Elle peut remplir trois fonctions principales qui sont :
- la fonction d’intermédiaire dans les échanges ;
- la fonction de réserve de valeur ;
- la fonction d’expression d’unité de compte pour le calcul économique ou la comptabilité »[1].
Les formes de la monnaie : il existe plusieurs sortes d’instruments de circulation que l’on regroupe souvent dans la littérature économique sous le terme de « forme de la monnaie ».
- la monnaie métallique : pièce de métal frappée par l’autorité souveraine pour servir à la mesure des valeurs, aux échanges, à l’épargne : Monnaie d’or, d’argent, de cuivre[1].
- la monnaie fiduciaire : elle regroupe les billets de banque émis par la banque centrale et les pièces émises par le trésor.
- La monnaie scripturale : elle correspond aux sommes déposées sur les comptes courants ou comptes chèques ouverts par les particuliers ou entreprises auprès d’établissements financiers. La monnaie scripturale circule par le biais de moyens de paiement scripturaux que sont les chèques, les virements bancaires, les prélèvements et les cartes[2].
- La monnaie électronique ou magnétique : « la monnaie électronique peut être définie comme l’ensemble des techniques informatiques, magnétiques, électronique et télématique permettant l’échange de fonds sans support de papier »[3]. Elle est considérée comme étant une valeur monétaire stockée électroniquement lors de la réception de fonds et servant à payer des transactions.
Les agrégats monétaires : en recensant la monnaie par les agrégats, on cherche à délimiter le potentiel des dépenses immédiates, la réserve de trésorerie et la liquidité susceptible d’être utilisée sans délai sur le marché des biens et services. Les agrégats monétaires représentent donc plusieurs concepts s’emboitant les uns dans les autres en allant des actifs plus liquides au moins liquides ; avec quatre ensembles du plus étroit au plus large : M1, M2, M3, M4.
M1 rassemble : les billets émis par la banque centrale, les monnaies divisionnaires (pièces métalliques) émises par le trésor et les dépôts à vue utilisables par chèques, virement, cartes de crédits, etc.
M2 regroupe M1 plus (+) : les comptes sur livrets, offerts par les banques et les caisses d’épargne ; les comptes d’épargne populaire et les livrets d’épargne logement.
M3 regroupe M2 plus (+): les comptes à terme et bons non négociables ; les certificats de dépôts et assimilés (titres à court terme d’une échéance de 10 jours à 02 ans émis par les intermédiaires financiers); les actions émises par les sociétés d’investissement à capital variable (SICAV) à court terme; la totalité des placements monétaires (dépôts à vue, comptes à terme, certificats de dépôt) en devise détenus par les résidants.
M4 agrégat le plus large, recense M3 plus (+) : les billets de trésorerie détenus par les agents non financiers; les bons de trésor négociables émis par l’Etat de 04 semaines à 05ans et détenus par les agents non financiers.
L’utilité de ces agrégats monétaire réside dans leur analyse qui indique les mouvements de substitution entre les divers éléments de la masse monétaire. En outre, les agrégats sont des cibles que la politique monétaire tente de contrôler en déterminant les normes d’accroissement.
2-2- les instruments et les objectifs de la politique monétaire
La politique monétaire est l’un des instruments dont disposent les responsables économiques d’un pays, et qui se présente comme étant l’un des moyens par lequel l’autorité monétaire, en général la banque centrale, agit sur l’offre de la monnaie dans le but de remplir les objectifs de la politique économique.
Définir une politique monétaire est une obligation pour un pays, car la production de moyens de paiement (création monétaire) ne peut être laissée à la seule initiative des agents privés. En effet, même si la monnaie est un moyen permettant la croissance économique, il ne faut pas qu’elle soit disponible en grandes quantités pour ne pas créer de l’inflation.
La politique monétaire est définie comme étant « un instrument de la politique économique au même titre que la politique fiscale, sociale…etc. Elle régule la création de la monnaie (contrôle de la masse monétaire) et consiste donc à fournir des liquidités nécessaires au bon fonctionnement de l’économie tout en veillant à la stabilité de la monnaie. La politique monétaire doit être compatible avec les objectifs du gouvernement »[1]. Donc, la politique monétaire doit procurer à l’économie la quantité de monnaie nécessaire à la réalisation d’un taux appréciable de croissance économique et à l’emploi, tout en préservant la stabilité de la monnaie au niveau interne (prix) comme au niveau externe (change).
- La conception de la politique monétaire dans les théories économiques
Le développement de l’environnement économique a contribué à l’émergence de plusieurs théories monétaires en l’occurrence ; la théorie classique, la théorie keynésienne et la théorie monétariste. Ces théories, suivant la conception de la nature de la monnaie sur laquelle elles se fondent, ont conduit à des applications divergentes en matière de politique monétaire.
- Les instruments et les objectifs de la politique monétaire
Le fonctionnement de la politique monétaire est traditionnellement présenté à partir d’une grille d’analyse qui relie ses instruments à ses objectifs finaux, en faisant jouer différents canaux de transmission selon le schéma suivant :
Schéma N° 01 : canaux de transmission de la politique monétaire.

Source : Dominique Plihon, « « la monnaie et ses mécanismes », 3e édition La Découverte, Paris 2003 », p86.
La politique monétaire est une composante importante de la politique économique qui, à coté de la politique budgétaire et fiscale, contribue à la régulation macroéconomique. Ses objectifs finaux sont donc, en principe, ceux de la politique économique générale. Ceux-ci peuvent être présentés par le carré magique schématisé ci-dessous, dont les quatre sommets sont : taux d’inflation (une inflation maitrisée se matérialisant en une stabilité des prix), taux de croissance (une croissance économique soutenue), taux de chômage (un faible taux de chômage) et solde extérieur (un équilibre extérieur).
Schéma N°02 : le carré magique

Source : Jézabel Couppey- Soubeyran, « monnaie, banque, finance », 1ere édition, Paris, 2010, P214.
De ce fait, la politique monétaire est considérée comme un levier important qui permet de réaliser les objectifs ci-dessus cités, sachant que l’objectif principal de la politique monétaire est d’adapter le mieux possible l’offre de la monnaie du système bancaire aux besoins des agents économiques, afin de favoriser la croissance et le plein emploi. Pour concrétiser les objectifs finaux visés par la politique monétaire, les autorités monétaires doivent respecter une priorité, considérée comme étant la principale finalité de toute politique monétaire, il s’agit en effet de la stabilité des prix. Afin d’atteindre cet objectif, les autorités monétaires définissent des objectifs intermédiaires, lesquels peuvent êtres considérés comme des indicateurs dont les variations seraient un bon reflet de l’objectif final (stabilité des prix) ; pour qu’ils soient efficaces, les objectifs intermédiaires doivent satisfaire un certain nombre de conditions[1] :
- Ils doivent, en effet, être un bon reflet de l’objectif final escompté, c’est-à-dire des bons indicateurs de l’évolution de l’objectif final ;
- Leurs évolutions doivent êtres aisément contrôlables par la banque centrale ;
- Ils doivent enfin être clairs, simple à comprendre par le public, c’est-à-dire lisibles par tous les acteurs économiques.
Ainsi donc, la réalisation de l’objectif final passe par une action qui s’appuie sur des objectifs opérationnels qui, à leurs tours, permettent d’atteindre des objectifs finaux comme on l’a déjà montré dans le premier schéma.
- Les objectifs intermédiaires
En clair, l’action des autorités monétaires doit tenter de viser un « bon » niveau de croissance de la masse monétaire, un « bon » niveau de taux d’intérêt et un « bon » niveau de taux de change, le tout en facilitant une « bonne » allocation des ressources financières de la nation. En pratique, les objectifs intermédiaires sont de trois sortes et sont ciblés donc sur des variables mesurant des quantités ou des prix : les agrégats monétaires, les taux d’intérêt, les taux de change. Le choix de l’objectif intermédiaire dépend essentiellement des deux séries de facteurs :[2]
- Le contexte institutionnel : lorsque l’intermédiation bancaire est le principal circuit de financement de l’économie, un agrégat mesurant le crédit bancaire peut apparaitre comme le meilleur objectif intermédiaire ; ce rôle plutôt dévolu au taux d’intérêt si la finance directe de marché joue un rôle pondérant. Lorsqu’un pays opte pour un régime de change fixe (comme est le cas du système monétaire européen), le taux de change peut être retenu comme un objectif intermédiaire.
- Le cadre théorique de référence: lorsque la doctrine monétariste s’est imposée à partir de la fin des années soixante dix, la plupart des pays industrialisés ont retenu la masse monétaire comme objectif intermédiaire. Ce choix obéissait au double postulat issu de la théorie quantitative de la monnaie, et qui affirme qu’il existe un lien étroit entre la monnaie en circulation et le rythme d’inflation, sachant que l’offre de monnaie est exogène, c’est-à-dire contrôlée par les autorités monétaires. Entant donné que ces postulats sont loin d’être vérifiés, un nombre croissant de pays ont été amenés à abandonner cet objectif intermédiaire.
Les objectifs opérationnels : pour atteindre ces objectifs intermédiaires, les autorités monétaires peuvent agir sur des objectifs opérationnels, c’est-à-dire des variables qu’elles peuvent contrôler directement (taux de réescompte, taux du marché de la monnaie centrale ; cela veut dire des taux auxquels s’échange la monnaie centrale et quantité de monnaie centrale). Deux raisons monétaires amènent les autorités monétaires à utiliser ces objectifs[1] :
- La masse monétaire est un concept de plus en plus difficile à mesurer et son évolution n’est pas contrôlée avec précision par les autorités monétaires ;
- Les autorités monétaires peuvent avoir besoin d’envoyer des signaux rapides, clairs et précis aux opérateurs et aux marchés par rapport au sens de leur politique. Ce rôle (objectifs opérationnels) est joué le plus souvent par les taux d’intérêt à court terme, car ceux-ci permettent en général de déterminer le caractère plus au moins restrictif de la politique monétaire.
- Les instruments de la politique monétaire
Pour atteindre ses objectifs, la banque centrale dispose d’une série d’instruments de politique monétaire, il s’agit de variables qui sont directement ou indirectement sous le contrôle de la banque centrale. Ainsi, le choix de ces instruments est étroitement lié à l’évolution du système financier ; c’est-à-dire, ce choix est largement déterminé par les caractéristiques de l’économie et plus particulièrement du système financier dans lequel opère la politique monétaire.
Dans une économie où les marchés financiers, les marchés monétaires et des changes sont suffisamment développés et intégrés, le financement de l’économie se fait principalement par ces marchés et secondairement par le crédit bancaire. Dans ce cas, l’on recourt aux instruments indirects dits de marché qui sont le réescompte et l’open market. Par contre, dans une économie où les marchés financiers sont peu développés, le financement de l’économie se fait principalement par le crédit bancaire. Dans ce cas, les autorités monétaires agissent par des instruments directs, qui sont : l’encadrement de crédits ainsi que la sélectivité des crédits.
La première catégorie d’instruments (directs) agit directement sur la quantité de crédits accordés à l’économie par l’encadrement et la sélectivité de crédits. Quant à la seconde catégorie d’instruments (indirects), la banque centrale cherche à agir sur la liquidité bancaire de manière à influencer les taux d’intérêt à court terme ainsi que le pouvoir de création monétaire des banques. La banque centrale agit de deux manières sur la liquidité bancaire et les taux d’intérêt. En effet, elle peut créer plus au moins de monnaie centrale en refinançant les banques (réescompte), comme elle peut également contraindre les banques commerciales à détenir plus ou moins de monnaie centrale sous formes de réserves obligatoires.
Les canaux de transmission de la politique monétaire
Il est important de comprendre comment l’utilisation des différents instruments qui viennent d’être présentés sur l’économie et permet aux autorités monétaires d’atteindre leurs objectifs finaux ou les objectifs qu’elles se sont fixés. On appelle donc de canaux de transmission « les voies par lesquelles les inflexions de la politique monétaire se répercutent sur l’économie réelle »[2]. Elles peuvent être regroupées en quatre grandes catégories qui sont données comme suit: le canal du crédit, le taux de change, le taux d’intérêt et enfin le prix des actifs.
La mutation du système financier rend de plus en plus difficile le contrôle de la quantité de la monnaie en circulation par les autorités monétaires. Cela nous renvoie à la difficulté de définition d’un agrégat cible qui soit maitrisable, vu la place de moins en moins importante du système bancaire dans le système financier et les innovations financières. Par ailleurs, les instruments hors marché de la politique monétaire comportent certaines limites et inconvénients. L’encadrement de crédit va en contre de la concurrence entre banques. Le réescompte ne permet pas une ponction de liquidité bancaire. Quand aux réserves obligatoires, elles privent les banques de la rentabilisation d’une partie de leurs dépôts.
- Esquisse de la conduite de la politique monétaire en Algérie depuis l’indépendance à nos jours
Dans la section précédente, nous avons esquissé le cadre théorique de la politique monétaire dans lequel nous avons illustré d’une manière générale les objectifs, les instruments et les canaux de transmission de la politique monétaire, qui nous serviraient d’outils dans cette présente section pour illustrer de manière précise la politique monétaire suivie par l’Algérie depuis l’indépendance.
A cet effet, il ya lieu d’expliciter les objectifs et la conduite de la politique monétaire en Algérie qui est intervenue dans deux contextes distincts, à savoir la période centralisée et la période de transition caractérisée par le lancement des réformes économiques et monétaires. En effet, le système financier Algérien a connu plusieurs phases durant son évolution. La période post indépendance est caractérisée par la récupération de la souveraineté monétaire et financière et la nationalisation des secteurs clés de l’économie. C’est une période de préparation à la planification. Après cette période, vient la période de planification à partir de 1970 qui est marquée par la centralisation des décisions et planification financière.
Pour étudier les causes et les conséquences des réformes économiques et structurelles adoptées par l’Algérie, notamment d’ordre monétaire auxquelles on s’intéressera, puisqu’elles apportent les fondements de la mise en œuvre de la politique monétaire, nous avons scindé cette présente section en trois étapes. La première présente la politique monétaire en Algérie durant la période de planification centralisée (1962-1989), la seconde présentera la politique monétaire durant la période de transition vers l’économie de marché. Et la dernière sera consacrée à l’étude de la politique monétaire durant la décennie 2000-2011.
- La politique monétaire durant la période de planification centralisée (1962-1990)
Après l’indépendance, l’Algérie s’est orientée vers un système économique centralisé, fondé sur l’orientation des mécanismes de développement économique. Cette période est marquée par la récupération du pouvoir monétaire et financier et la création d’un nombre d’institutions telles que ; le trésor public en 1962 qui a pour objectifs principaux, l’allocation des recettes aux dépenses de l’Etat, la tutelle des activités financières et le financement des investissements, la Caisse Nationale de Développement (CAD) en 1963 qui est spécialisée en octroi de crédits d’investissements, la Caisse Nationale d’Epargne et de Prévoyance (CNEP) en 1964 qui a pour rôle principal la collecte de l’épargne populaire en vue de favoriser le crédit au logement et aux collectivités locales. Ainsi, la loi n°62-144 du 13/12/1962 créa la Banque Centrale d’Algérie (BCA), à laquelle furent annexés ses statuts.
En outre, au cours de cette période allant de 1962-1990, le choix de la politique monétaire dépendait du mode de financement de l’économie nationale, tel que la distribution des crédits qui était orientée par des procédures administratives en dehors de critères de rentabilité[1]. Ce crédit qui constitue l’offre de la monnaie est une variable exogène, puisque la Banque d’Algérie refinançait les banques commerciales par les recettes provenant des rentes pétrolières sans pour autant avoir une contre partie réelle sous forme de production nationale. La loi du 13 décembre 1962 avait investi la BCA du rôle d’émission de la monnaie centrale ainsi que de celui relatif à la supervision de l’activité bancaire. Dans ce contexte, l’alinéa premier de l’article 36 des statuts de la BCA définit les missions de la BCA comme suit : « la banque centrale a pour mission de créer et de maintenir dans le domaine de la monnaie, du crédit et des changes les conditions les plus favorables à un développement ordonné de l’économie nationale, en promouvant la mise en œuvre de toutes les ressources du pays, tout en veillant à la stabilité interne et externe de la monnaie ». De ce qui précède, nous pouvons conclure que la politique monétaire, tel que définie par ces statuts, consistait à alimenter l’économie en fonds nécessaires au bon fonctionnement de l’entreprise publique par l’intermédiaire des banques. En effet, en raison de sa dépendance du gouvernement, la BCA n’a pas pu définir sa propre politique monétaire[2], ce qui a limité ses prérogatives à la gestion du système monétaire par l’orientation de la politique monétaire et la supervision de l’ensemble du système bancaire. Notons que le rôle de la banque centrale (banque d’émission) est d’émettre la monnaie fiduciaire, en fonction des objectifs de la politiques monétaires et des mouvances de la conjoncture économique d’une part, et d’apporter des concours à l’Etat, entant que banque d’Etat et de réserve, en consentant au trésor des avances en compte courant et en escomptant des obligations cautionnées, et sur le plan externe, elle gère la devise et veille à l’application de la législation et de la réglementation des changes, d’autre part.
- La gestion de la politique monétaire :
La gestion de la politique monétaire, au cours de cette période, était centralisée et réduite à sa simple expression en assurant l’offre de monnaie tout en veillant impérativement s’adapter aux besoins de l’économie.
L’offre de la monnaie : Pour rattraper le retard enregistré par l’Algérie en matière économique, les autorités algériennes se sont vues obligées de procéder à plusieurs plans de développement (investissements productifs), qui nécessitent des montants colossaux, ce qui a engendré une offre importante de monnaie sous formes d’avances au trésor ou encore sous forme de refinancement des banques commerciales en contrepartie des crédits qu’elles accordent aux entreprises publiques. Il est à noter que durant cette période, les autorités publiques ont tenté de stimuler la production locale par le biais de l’offre de monnaie, ce qui est contradictoire avec l’aspect réel, comme le montre le tableau suivant :
Tableau N° 01 : évolution de la masse monétaire et le produit intérieur brut (PIB) en Algérie (1964- 1985)
ANNEES |
TAUX DE CROISSANCE DE LA MASSE MONETAIRE |
TAUX D’ACCROISSEMENT DU PIB NOMINAL |
1964
1965
1966
1967
1968
1969
1970
1971 |
19%
10, 9%
9, 3%
29, 8%
35, 2%
19, 4%
7, 9%
6, 7% |
7, 6%
9, 2%
-0, 5%
10, 6%
15, 2%
9, 7%
14,8%
0, 2% |
1972
1973
1974
1975
1976
1977
1978 |
30, 1%
26, 4%
8, 9%
24 ,5%
30, 3%
22, 6%
30, 0% |
22, 6%
15, 9%
55, 9%
5, 0%
21, 5%
19, 8%
17, 5% |
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985 |
18, 1%
17, 9%
16, 7%
27, 8%
29, 6%
18, 1%
15, 3% |
26, 5%
26, 9%
17, 9%
7, 6%
10, 8%
11, 5%
11, 0% |
Source : Henni. A, « Monnaie, crédit, et financement en Algérie (1962-1987 », CRAD, 1987, P35.
Conformément au tableau ci-dessus, le taux de croissance de la masse monétaire est plus élevé par rapport à celui du PIB. Le taux moyen d’évolution de la masse monétaire (MM) entre 1964 et 1971 est de 17% par contre celui d’accroissement du PIB est de 8,5% seulement. La deuxième période allant de 1972 à 1978 est caractérisée par un écart moins important qui représente 25% pour la MM et 22,5% pour le PIB. Pour la troisième période allant de 1979 à 1985, on constate un ralentissement de la croissance de la masse monétaire (MM) avec une moyenne de 19,1%, contre 16,1% pour le PIB. Cette pression sur l’offre de monnaie, qui ne trouve pas une contrepartie réelle, s’est répercutée sur le niveau général des prix, dans la mesure où la croissance improportionnelle de la masse monétaire par rapport au PIB a induit l’apparition d’une tendance inflationniste en pleine croissance. Les taux d’inflation enregistrés pendant la période de 1970 à 1979 sont présentés dans le tableau ci-dessous :
Tableaux N°02 : évolution des taux d’inflation durant la période 1970-1979 en (%)
ANNEES |
1970 |
1971 |
1972 |
1973 |
1974 |
1975 |
1976 |
1977 |
1978 |
1979 |
TAUX D’INFLATION ANNUEL % |
6,6 |
2,6 |
3,7 |
6,2 |
4,7 |
8,4 |
9,4 |
12,0 |
17,7 |
11,3 |
Source : base de données de la banque mondiale.
Les objectifs de la politique monétaire
En Algérie, les décisions de la Banque Centrale sont influencées par le gouvernement en vigueur, elle adopte généralement une politique monétaire conforme aux objectifs de ce dernier, se basant essentiellement sur la réalisation du plein emploi et la disponibilité d’une liquidité suffisante du marché monétaire par une meilleure allocation des ressources tirées des dépôts des ménages, de la rente pétrolière ainsi que de l’endettement extérieur. Cependant, la stabilité de la monnaie est un objectif relégué au second plan.
Les instruments de la politique monétaire en Algérie
L’Algérie, durant la période d’économie centralisée, a favorisé l’utilisation des contrôles qualitatifs (sélectivités de crédits) et quantitatifs (encadrement de crédits), qui sont des mesures administratives visant à limiter le développement de l’activité des banques d’une part, et à encourager ou décourager un tel ou tel secteur d’activité, d’autre part.
Toutefois, les autorités ont adopté d’autres moyens d’action qui permettent d’équilibrer la liquidité bancaire et de financer l’économie, tels que le réescompte et l’action sur les taux d’intérêt qui étaient fixés administrativement sans se référer ni au coût, ni au rendement des crédits alloués. Au cours de cette période, les taux d’intérêts étaient déterminés en fonction des objectifs en matière de développement de différents secteurs à savoir le secteur industriel et le secteur agricole.
De ce qui précède, nous pouvons conclure que durant cette période de l’économie planifiée, la monnaie servait comme instrument permettant de réaliser les plans d’investissement du gouvernement. Etant donné que l’acteur principal de la politique monétaire est la banque centrale, et comme elle est dépendante du pouvoir public, désormais, durant cette période, on ne peut plus parler d’une politique monétaire au sens propre du terme.
- La politique monétaire durant la période de transition vers l’économie de marché (1990-2000)
Suite aux perturbations qui ont affecté l’économie algérienne depuis 1986, dues essentiellement à la chute des prix du pétrole, l’apparition des déséquilibres macroéconomiques, les autorités Algérienne se sont vues obligées d’engager des réformes économiques radicales en collaboration avec les différentes institutions financières internationales, notamment le Fonds Monétaire International (FMI). Qui donnera une aide d’appui à l’adoption des réformes des éléments afférents à la conduite de la politique monétaire, à laquelle on s’intéressera, sachant que durant cette période le gouvernement à procédé à la promulgation de la nouvelle loi sur la monnaie et le crédit et a adopté le plan d’ajustement structurel suite à l’accord conclu avec le FMI.
La politique monétaire à l’ombre de la promulgation de la loi relative à la monnaie et le crédit (LMC) de 1990
La LMC constitue une loi charnière dans l’histoire de l’économie algérienne, en raison des aménagements qu’elle a introduite. C’est un dispositif d’aide aux réformes économiques engagées depuis 1988, visant l’organisation et le bon fonctionnement du système bancaire et monétaire à fin de rétablir les meilleures conditions de transition vers une économie de marché et la libéralisation du commerce extérieur[1].
A l’ombre des apports de cette loi, nous nous intéresserons tout d’abord à ses objectifs ainsi qu’aux changements institutionnels et opérationnels qu’elle a apportés au système monétaire. Ensuite, nous allons nous pencher sur l’analyse de la conduite de la politique monétaire en termes d’objectifs et de choix de ses instruments.
Les objectifs de la LMC
Les principaux objectifs visés par cette loi sont d’ordres monétaires, financiers et économiques. La première catégorie vise à renforcer davantage le rôle de la banque centrale en matière de gestion de la politique monétaire, du change et de gestion de la dette extérieure, en lui confiant le privilège d’émission de la monnaie fiduciaire (arts 04, 05, 38 et 62), le pouvoir de contrôler les autres banques (art 112), et l’intervention sur le marché d’une manière active (fonction de la banque des banques) (arts 35, 36 et 37). Ainsi, elle vise l’ouverture du système bancaire aux investisseurs étrangers, et de permettre aux agents économiques de se refinancer auprès de différentes sources, à travers la création d’un marché financier. Quand aux objectifs économiques, il s’agit de mettre fin à toute ingérence administrative dans le secteur financier et bancaire, et à travers l’ouverture et l’encouragement des investissements étrangers (IDE), la LMC visait la réduction du chômage.
L’implication de la LMC dans l’autonomie de la Banque Centrale
En sus des objectifs déjà cités, la LMC se base sur le principe de l’indépendance de la Banque Centrale en annulant les lois antérieures qui subordonnaient le pouvoir monétaire au pouvoir public, en visant à la mise en place d’une logique monétaire saine, tout en disposant d’un pouvoir réel en matière de choix de la politique monétaire (avec des d’objectifs et des instruments performants) permettant la régulation monétaire et économique du pays. Les quatre fonctions attribuées à la Banque d’Algérie dans le cadre de la LMC sont : l’émission de l’unité monétaire nationale, banque des banques, banque de change et banque d’Etat.
Les implications de la LMC dans le processus de transition monétaire
Parmi les apports phares de la LMC, en matière de transition de l’économie Algérienne vers l’économie de marché, est l’autonomisation de la sphère monétaire et bancaire par rapport à la sphère budgétaire et la sphère réelle. Cette séparation s’est caractérisée par la suppression des avances systématiques de la Banque Centrale au trésor public. Désormais, ces concours sont limités en montant et en durée ; ne doivent pas dépasser 05% des recettes ordinaires de l’Etat, remboursables dans une échéance de 240 jours[2]. Ainsi, la LMC a contribué à la naissance et au développement du marché monétaire.
Objectifs et instruments de la politique monétaire selon la loi LMC
L’alinéa premier de l’article 35 de la loi 90-10 donne clairement les objectifs de la politique monétaire. Ce texte stipule que « la banque centrale a pour mission de créer et de maintenir dans le domaine de la monnaie, du crédit et des changes, les conditions les plus favorables à un développement ordonné de l’économie nationale, en provenant la mise en œuvre de toutes les ressources productives du pays, tout en veillant à la stabilité interne et externe de la monnaie » [1]. Donc, l’objectif ultime de la politique monétaire, durant cette période, était de réduire le taux d’inflation par le maintien d’une progression limitée des prix et d’assurer la stabilité du taux de change de la monnaie nationale. Pour atteindre cet objectif, la politique monétaire a tracé deux objectifs intermédiaires qui sont ; le contrôle de l’expansion de l’agrégat M2 et le taux de croissance de crédits.
Pour atteindre ces objectifs, il est nécessaire de recourir aux instruments de la politique monétaire qui ont connu un développement considérable durant cette période (période dite de réforme). La loi 90-10 a prévu divers instruments classiques de la politique monétaire notamment :
- le réescompte d’effets publics et privés;
- l’open market: vente et achat d’effets publics et privés ;
- la prise en pension d’effets publics et privés;
- la réserve obligatoire ; la loi 90-10 a préconisé dans l’article 93 ce qui suit : « la Banque Centrale peut exiger que les banques placent auprès d’elle, en compte bloqué, avec ou sans intérêt une réserve calculée, soit sur l’ensemble des dépôts, soit sur une catégorie de ceux-ci, soit sur l’ensemble de leurs placements, soit sur une certaine catégorie de ceux-ci, tant en monnaie nationale que en monnaie étrangère. Cette réserve est dénommée réserve obligatoire. Le taux de réserve obligatoire ne peut dépasser, en principe 28% des montants servant à la base de calcul. Cependant, la Banque Centrale peut fixer un taux supérieur en cas de nécessité dûment justifiée… »[2].
- La politique monétaire durant la période d’ajustement structurel (PAS) 1994-1998
Pour maitriser la crise qui s’est encore aggravée au début de 1994, caractérisée par un contexte hautement inflationniste induit par les déficits budgétaires et la détérioration de la balance de paiement, les autorités ont été amenées à définir un vaste programme d’ajustement structurel, sous l’appui du FMI. Le tableau ci-dessous retrace les encours de la dette extérieur (1990-1993).
Tableau N°03 : les dettes d’extérieurs
ANNEE |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
Stock de la dette en MD$ |
28,4 |
27,9 |
26,7 |
25,7 |
Service de la dette en MD$ |
8,9 |
9,5 |
9,3 |
9,1 |
Service de la dette/ exportation |
66,4 |
73,9 |
76,5 |
81,8 |
Source : ministère des finances. « la situation économique et financière en 2000 ». P41.
C’est dans ces conditions financières et monétaires désastreuses que l’Algérie a signé le programme d’justement structurel (PAS) avec le FMI. Ce programme d’ajustement structurel avait pour objectif de corriger les déséquilibres macroéconomiques et monétaires, libéraliser le système économique et renforcer l’application de la LMC.
La nouvelle orientation de la politique monétaire
C’est avec l’adoption du PAS que les autorités monétaires ont entamé l’adoption d’une politique monétaire au sens propre du mot[1]. En effet, cette politique était restrictive et se traduisait par la limitation des crédits octroyés au système bancaire (à l’égard de l’Etat) et de ceux accordés au secteur économique productif qui avait pour effet de réduire la masse monétaire en terme réel dans une première étape et de limiter sa croissance dans une seconde étape. C’est à partir de là que le contrôle de la création monétaire devient l’une des préoccupations de la politique économique, puisque la politique monétaire se voyait conférer un rôle actif en matière de résorption des déséquilibres internes (inflation) et externes (atténuer le poids de la dette extérieure).
En effet, les objectifs de la politique monétaire durant la période de réalisation du PAS sont définis dans l’instruction 16-94 du 09 avril 1994, relatif aux instruments de la politique monétaire et au refinancement des banques. Le paragraphe 05 de cette instruction stipule que « l’objectif principal de la politique monétaire est, de facto, la maitrise du rythme de l’inflation au moyen notamment d’un contrôle prudent de l’expansion monétaire et du crédit relativement à l’objectif d’inflation et de croissance. A cette fin, un plafond de croissance des avoirs intérieurs nets du système bancaire et un plafond de croissance des avoirs intérieurs nets de la Banque d’Algérie sont mis en place ». Pour atteindre l’objectif final qui se matérialise en la maitrise de l’inflation, un double objectif intermédiaire a été mis en avant à savoir la limitation de la croissance de la masse monétaire et celle de crédits, sachant que l’atteinte de ce dernier n’est pas évidente, il fallait définir l’objectif opérationnel consistant en le plafonnement de la croissance des avoirs intérieurs de la banque centrale (les crédits à l’Etat et aux banques) et ceux des banques (les crédits à l’Etat et à l’économie).
Pour atteindre ces objectifs, il y eu l’introduction de nouveaux instruments indirects de la politique monétaire mis en opération à coté des instruments directs déjà existants.
- La politique monétaire durant la période de l’économie de marché (2000-2011)
Le déséquilibre macroéconomique qu’a encouru l’économie Algérienne pendant les années 90 sur le plan interne et externe, agrémenté d’un taux d’inflation très élevé et d’un déficit de la balance des paiements qui persiste, ont donné des signaux très forts aux autorités publiques afin d’engager la réforme urgente du système monétaire et des pratiques bancaires. Notons que ces réformes ont été entreprises en collaboration avec le FMI qui a préconisé des plans de réformes structurelles à toutes les composantes économiques du pays, en admettant une nouvelle politique monétaire qui vise une meilleure allocation des ressources du pays ainsi que l’assurance de la stabilité interne et externe de la monnaie nationale.
C’est à partir de l’an 2000 que la consolidation des objectifs de stabilisation a commencé à se mettre en place en matière de modération de l’inflation et de rétablissement de l’équilibre de la balance de paiement. Pour assurer la continuité de la stabilité monétaire et le renforcement des agrégats macroéconomique, la Banque d’Algérie a mis en œuvre une politique monétaire plus autonome, encadrée par un circuit prudentiel, suite à la promulgation de deux ordonnances complémentaires à celle du 90-10, la première édictée le 27février 2001 et l’autre le 26 aout 2003.
Le processus de la création monétaire
La création monétaire en Algérie, durant la période qui a succédé à celle du PAS, est le résultat d’augmentation des avoirs extérieurs (composés essentiellement des recettes des hydrocarbures ) au détriment des crédits accordés à l’Etat et à l’économie, comme le montre le tableau suivant :
Tableau N°04: évolution des contreparties de la masse monétaire (1999-2011) en %
ANNEES |
AGREGATS MONETAIRES |
AVOIRS EXTERIEURS |
CREDITS A L’ETAT |
CREDIT A L’ECONOMIE |
1999 |
-59 |
56 |
27 |
2000 |
20,5 |
-20, 09 |
– 13, 6 |
2001 |
11,0 |
-15, 9 |
8, 5 |
2002 |
33, 9 |
1, 6 |
17, 5 |
2003 |
33, 4 |
-22, 7 |
8, 8 |
2004 |
33, 1 |
-104, 9 |
11, 2 |
2005 |
34 |
4430, 1 |
15, 9 |
2006 |
31,9 |
-8, 9 |
7, 1 |
2007 |
34, 5 |
-26, 5 |
17, 2 |
2008 |
38, 2 |
-25, 2 |
20, 4 |
2009 |
5, 0 |
0, 2 |
18, 5 |
2010 |
10, 5 |
-4, 7 |
12, 5 |
2011 |
12, 5 |
-1, 9 |
12, 02 |
Source : données tirées des différents rapports de la Banque d’Algérie (2002, 2006, 2009) et rapport du FMI n°11/39, mars 2011.
De l’analyse du tableau ci-dessus cité, nous pouvons conclure que :
La principale source de création monétaire provient de l’augmentation des avoirs extérieurs et des réserves de changes, en raison de la reprise des cours du baril sur le marché pétrolier par rapport à la fin de la décennie 80 et début de la décennie 90, sachant que ces prix ont connu une extension à partir de 2000, grâce au progrès des prix de baril. Ces avoirs ont enregistré une extension stable, à l’exception des deux années 2009 et 2010 où ils ont connu un recul de leurs taux à 5% et 10,5% du principalement aux effets de la crise financière mondiale.
L’autre source de création monétaire est les crédits accordés au trésor public. D’après les taux figurant dans le tableau ci-dessus, cette décroissance se reflète principalement par l’augmentation des recettes issues de la fiscalité pétrolière et de la création d’un fond de régulation des recettes. La position du compte de trésor, au niveau de la banque d’Algérie, est positive, c’est-à-dire qu’il n’est pas endetté à l’égard de l’institut d’émission et la part relative des encours à l’Etat dans les contreparties de la masse monétaire est moins importante que celle de la période de planification. Quant aux crédits à l’économie, ces derniers connaissent des fluctuations en matière de croissance et leurs parts relatives dans la contrepartie de la masse monétaire diminuent. Cela se traduit, en effet, par le manque d’engagement des banques commerciales en matière de financement de l’économie. A partir de 2005, on remarque une reprise légère à la hausse des crédits accordés à l’économie.
En procédant à l’analyse de la structure de la masse monétaire, à travers le tableau ci-dessous ;
Tableau N°05: évolution des composantes de la masse monétaire (2000-2011)
Année |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
M2 |
2025.2 |
2475.2 |
2905.5 |
3354.4 |
3738 |
4157.6 |
4933.7 |
5999.6 |
6955.9 |
7178.7 |
8188 |
Circulation fiduciaire |
484.5 |
577.2 |
664.7 |
781.4 |
874.3 |
921.1 |
1081.4 |
1284.5 |
1540 |
1829.4 |
1388.6 |
Dépôts à vue |
467.5 |
554.9 |
642.2 |
718.9 |
1127.9 |
1224.9 |
1750.4 |
2570.4 |
2965.1 |
2541.9 |
3539.7 |
Dépôts au trésor et CCP |
96.2 |
106.4 |
109.4 |
130.1 |
158.3 |
276 |
335.8 |
378.7 |
459.8 |
578.5 |
735.4 |
Quasi monnaie |
974.3 |
1235 |
1485.2 |
1724 |
1577.5 |
1736.2 |
1766.1 |
1071 |
1991 |
2228.9 |
2524.2 |
Circulation fiduciaire/M2 en % |
24 |
23 |
23 |
23 |
23 |
22 |
22 |
21 |
22 |
25 |
17 |
Dépôts à vue /M2 en % |
23.08 |
22.4 |
22.1 |
21.4 |
30.1 |
29.5 |
35.5 |
42.8 |
42.6 |
35.4 |
43.2 |
Dépôts à terme /M2 en % |
48.1 |
49.8 |
51.1 |
51 .3 |
42.2 |
41.7 |
35.8 |
17.8 |
28.6 |
31 |
30.8 |
Source : élaboré à partir des rapports de Banque d’Algérie pour 2002, 2007 et 2010.
Les principales tendances de croissance des composantes de la masse monétaire apparaissent clairement, leurs évolutions d’une année à l’autre est claire. A leur tête, la circulation fiduciaire qui constitue une part moyenne de 22% sur le total de la masse monétaire.
La conduite de la politique monétaire durant la période 2000-2011
La volatilité des revenus a des conséquences importantes sur la liquidité des banques et la politique monétaire. En effet, à partir de 2001, le système bancaire Algérien a enregistré un accroissement prodigieux de ses liquidités qui ont atteint un chiffre record de 2001,8 milliards de DA avec une expansion de 74% à fin décembre 2007.
Face cette surliquidité du système bancaire, les autorités monétaires Algériennes ont adopté une politique monétaire prudente et active[1], et ce pour stabiliser les prix en stérilisant les surplus de liquidités par un renforcement de l’intervention de la Banque Centrale sur le marché monétaire. Pour ce faire, la banque centrale a modélisé ses objectifs en matière de ciblage du taux d’inflation, conformément aux attributions générales da la banque d’Algérie, sachant que l’article 35 de l’ordonnance n°03-11 du 26 aout 2003 relative à la monnaie et au crédit confère à cette dernière les missions suivantes: « la banque centrale a pour mission de créer et de maintenir dans les domaines de la monnaie, du crédit et des changes, les conditions les plus favorables à un développement rapide de l’économie, tout en veillant à la stabilité interne et externe de la monnaie. A cet effet, elle est chargée de régler la circulation monétaire, de diriger et de contrôler, par tous les moyens appropriés, la distribution du crédit, de veiller à la bonne gestion des engagements financiers à l’égard de l’étrangers et de réguler le marché des changes »[1].
Les conséquences monétaires provoquées par les chocs pétroliers et les limites inhérentes à la faiblesse des capacités d’absorption des excédents de liquidité par le système productif ont eu des incidences importantes sur la politique monétaire ainsi que sur les instruments de régulation. Afin de réduire la liquidité globale et parvenir à atténuer le risque inflationniste, objectif ultime de la politique monétaire, la Banque d’Algérie a fait recours dès le début de l’an 2001 à l’instrumentation traditionnel de réserves obligatoires, dans la mesure où elle a maintenu à la hausse les taux de réserves obligatoires au cours de l’année 2004, pour assurer la stabilité de la surliquidité du marché monétaire ; le taux de réserve obligatoire a été porté à 6,5% en mars 2004, contre 6,25% depuis décembre 2002 et 4,25% en 2001. Ce taux de réserve obligatoire a été revu à la hausse, pour atteindre un taux sans précédant de 9% en 2010[2].
Tout au long de cette section, nous avons tenté de mettre en évidence les différentes politiques monétaires appliquées par l’Algérie au cours de chaque période étudiée, en allant de la phase de la gestion centralisée, à la phase de transition et enfin à la phase d’économie de marché. Ainsi, nous avons mis en exergue les fondamentaux qui ont influencé cette politique en matière de choix d’objectifs et d’instruments.
Il est à noter que la première période allant de 1962 à 1990, a été caractérisée par la passivité de la politique monétaire en matière du contrôle de la stabilité monétaire, ce qui s’est traduit par des taux d’intérêt à la fois faibles et rigides qui ont poussé les autorité monétaires Algériennes à recourir systématiquement à la création de la monnaie et à l’endettement extérieur. Ainsi, ils ont permis de compenser les besoins de l’économie surtouts des investissements productifs. La seconde période allant de 1990 au 2000, qui a débuté avec l’avènement de la loi de la monnaie et du crédit et l’adoption du plan d’ajustement structurel (PAS) qui ont apporté des réformes majeures au système monétaire et financier en Algérien, ce qui a permis la mise en œuvre d’une nouvelle politique monétaire dont l’objectif ultime est la stabilisation de la monnaie nationale sur le plan interne et externe ainsi que la réduction des déséquilibres macroéconomiques, en faisant appel aux instruments indirects. En fin, la troisième phase allant de 2001 au 2011, caractérisée l’accroissement des recettes extérieures Algériennes dues exclusivement à la hausse des prix du pétrole (nouvelle source de création monétaire). Les recettes issues de la rente pétrolière ont permis une aisance en matière de liquidité du système bancaire d’une part, et le développement d’un marché interbancaire, d’autre part. Durant cette période, la politique monétaire est jugée prudente ayant pour objectif ultime la lutte contre l’inflation.
Les résultats de la politique monétaire de stabilisation 1990-2011
Dans cette partie, nous tenterons de mettre le point sur la cohérence des objectifs préalablement tracés par l’autorité monétaire, et leur réalisation au niveau de la sphère monétaire (le contrôle de la croissance des agrégats monétaires, le taux d’inflation, et le taux de change) ainsi que la sphère réelle.
Les résultats de la politique monétaire de stabilisation 1990-1999
Les changements apportés à la politique monétaire durant cette période, suite à la promulgation de la loi 90-10 ainsi que la mise en place du plan d’ajustement structurel en 1994 chapeauté par le FMI, sont à replacer dans le cadre des réformes et difficultés qu’a subies l’économie Algérienne, sachant que les objectifs de la politique monétaire sont principalement orientés vers la stabilisation des variables macroéconomiques (inflation et taux de change). Pour ce faire, la Banque Centrale a déployé des instruments directs tels que le plafonnement du réescompte, l’encadrement du crédit et le plafonnement du taux d’intérêt.
En premier lieu, nous allons nous intéresser à l’évaluation des sources qui ont fait l’objet de la création monétaire durant cette période de transition, tout en se référant au schéma ci-dessous :
Schéma N°02 : sources de création monétaires

Source : élaboré à partir des rapports de Banque d’Algérie
De l’analyse du graphe ci-dessus, on peut déduire que la création monétaire résulte en grande partie des crédits accordés à l’économie et du financement monétaires des déficits budgétaires du trésor qui assure le sauvetage des entreprises publiques ainsi que l’essentiel des investissements. Le tableau suivant retrace l’importance des déficits budgétaires enregistrés par l’Algérie au cours de la période (1990-1999)
Tableau : évolution des soldes su trésor (1990-1999)
Années |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Soldes globaux en mds DA |
20.2 |
18.6 |
-12.2 |
-108 |
-65 |
-28 |
-75 |
66.2 |
-108.2 |
16.5 |
Solde en PIB |
6.3 |
2.4 |
-1.2 |
-8.7 |
-4.7 |
-1.4 |
-2.5 |
2.37 |
-3.23 |
-0.5 |
Source : statistiques tirées du rapport du FEMISE. Essaie de mesure de l’impact de l’Accord d’Association sur les prix à la production et à la consommation. 2004. P7
Malgré les mesures énoncées à la veille de la promulgation de la LMC en 1990, prévoyant la minimisation des déficits budgétaires, ces dernières n’ont pas donné de résultats satisfaisants en la matière. Comme le montre le tableau ci-dessus, les déficits budgétaires continuent de s’accentuer à partir de 1992 pour s’aggraver en 1993. Par cotre, on remarque une amélioration des soldes, à partir de 1994 -1999, sachant que cette période coïncide avec l’adoption du PAS. Notons que ces améliorations ont eu des incidences favorables sur l’évolution de la sphère monétaire.
La politique de taux de change : le taux de change est un objectif ultime de la politique monétaire, eu égard à son rôle hautement important en matière d’ouverture économique des pays. L’Algérie a procédé à une dévaluation des cours de change, à partir de 1991, pour freiner la demande globale et réduire les importations. La logique de cette dévaluation consistait à renchérir les importations et limiter la demande des devises nécessaires à leur financement. En revanche, cette démarche n’a eu aucun effet sur la compétitivité extérieure de l’Algérie, du moment qu’il s’agit d’un pays mono exportateur qui n’a aucune production hors hydrocarbures. Ses exportations sont composées à 98% par les hydrocarbures. Par conséquent, cette dévaluation a mis l’entreprise Algérienne en péril, vu l’augmentation de sa dette extérieure d’une part, et l’augmentation des prix des intrants dû à la dévaluation du Dinars Algérien.
La politique de maitrise de l’inflation
La nouvelle politique monétaire engagée, durant cette période, suite à la promulgation de la loi sur la monnaie et crédit n’a pas pu apaiser les tendances inflationnistes qui secouaient l’économie Algérienne depuis des années, dues essentiellement à l’importance de la masse monétaire mise en circulation ainsi qu’à la dévaluation de la monnaie et la libéralisation des prix (augmentations les charges de production et les prix des produits importés). A partir de 1996, nous avons constaté une certaine maitrise des taux d’inflation due à l’adoption d’une nouvelle politique recommandée par le FMI.
Les résultats de la politique monétaire durant la période 2000-2011
L’évaluation des résultats de la politique monétaire doit être faite par rapport à l’évolution de la sphère monétaire ou réelle et dans la mesure où les objectifs fixés ont été atteints.
L’évolution de la sphère monétaire
L’objectif attribué à la politique monétaire est la maitrise du taux d’inflation qu’on peut extraire à partir de rapport de la Banque d’Algérie de 2003, qui stipule : « l’objectif ultime de la politique monétaire est de maitriser la stabilité monétaire à travers la stabilité des prix, entendue comme une progression limitée à l’indice des prix à la consommation »[1]. À titre indicatif, le taux d’inflation maintenu par le Conseil de Monnaie et de Crédit (CMC) à moyen terme est de 3%. Pour atteindre cet objectif, la Banque d’Algérie a définit des objectifs intermédiaires qui sont la croissance de la masse monétaire (M2), sachant que cette dernière passe par le contrôle de la base monétaire.
Comme le montre le graphe ci-dessus (N°1), pour pouvoir maitriser l’expansion monétaire, il ya lieu d’abord de maitriser les sources de la création monétaire.
Conformément au graphe ci-dessus (N°01), nous constatons que les avoirs extérieurs jouent un rôle important dans l’expansion monétaire et exercent un effet d’éviction sur les avoirs intérieurs. Et étant donné que les avoirs extérieurs sont constitués essentiellement des recettes issues des hydrocarbures, dont les cours sont une variable exogène, il est difficile à la Banque d’Algérie de limiter leurs croissance. De ce fait, cette dernière passe au contrôle strict des crédits à l’économie et à l’Etat dans un objectif de faire face aux conséquences intérieures de la création monétaire que subit l’économie Algérienne, que nous illustrons dans ce tableau :
Tableau N°06: évolution de la masse monétaire et le PIB
Années |
Evolution M2 |
Evolution de PIB |
Taux de liquidité
M2/PIB |
Vitesse de circulation de la monnaie PIB/M2 |
En milliards de DA |
En % |
M2 ciblé en % |
En milliards de DA |
En % |
|
2000 |
2025,2 |
13,1 |
– |
4078,8 |
49,6 |
2,01 |
2001 |
2475,2 |
22, 2 |
– |
4222,1 |
58,6 |
1, 70 |
2002 |
2905,8 |
17, 3 |
– |
4455,0 |
65,2 |
1, 53 |
2003 |
3354,4 |
15, 6 |
– |
5265,93 |
63,7 |
1, 57 |
2004 |
3738 |
11, 4 |
14-15 |
6127,86 |
61,0 |
1, 64 |
2005 |
4157,6 |
11, 2 |
15.8- 16.6 |
7504,69 |
55,4 |
1, 8 |
2006 |
4933,2 |
18, 7 |
14.8- 15.5 |
8390,6 |
58,8 |
1, 7 |
2007 |
5991 |
24, 1 |
17.5-18.5 |
9302,8 |
64,4 |
1,55 |
2008 |
6956 |
16, 4 |
27-27.5 |
10988,9 |
63,3 |
1,58 |
2009 |
7173 |
3, 1 |
12-13 |
10131,3 |
70,8 |
1, 4 |
2010 |
8188 |
14, 1 |
– |
11730,6 |
69,8 |
1, 43 |
Source : rapport de la Banque d’Algérie pour 2005, « évolution économique et monétaire en Algérie », avril 2006, P145.
Conformément au tableau ci-dessus, la masse monétaire est en expansion d’un taux moyen de 15,5% et non proportionnelle à celle de l’évolution du PIB. Cette expansion montre bien que la Banque d’Algérie n’a pas pu contrôler l’offre de monnaie sous l’effet d’une monétisation des avoirs extérieurs qui sont en fort afflux durant cette période.
A cet effet, il parait difficile de cibler un taux d’inflation autour de 3%, comme le démontre le schéma ci-après :
Schéma N°03 : l’évolution du taux d’inflation

Source : élaboré à partir des données de la banque d’Algérie.
Résultat de la sphère réelle
La politique monétaire engagée durant cette période a été focalisée sur la lutte contre l’inflation. Cependant, la croissance économique est un objectif de deuxième ordre assigné à la politique monétaire. La réalisation de cet objectif ne se consolidera que par une allocation adéquate des ressources financières et du capital humain à la promotion de la croissance.
Pour ce faire, la nous allons nous atteler sur l’évaluer du rôle de la politique monétaire dans le financement de l’économie à travers le tableau ci-dessous
Années |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
Crédits à l’économie |
993.7 |
1078.4 |
1266.8 |
1380.2 |
1535 |
1779.8 |
1905.4 |
2205.2 |
2615.5 |
3086.5 |
3585 |
Evolution en % |
6,2 |
8,5 |
17,5 |
9 |
11,2 |
15 |
7 |
15 |
18 |
18 |
16 |
Crédits à l’économie/PIB |
22,89 |
25,54 |
28,43 |
26,21 |
25,05 |
23,71 |
22,71 |
23,7 |
23,8 |
30,46 |
30,56 |
Multiplicateur de crédit |
1,8 |
1,38 |
1,5 |
1,2 |
1,32 |
1,5 |
1,42 |
1,27 |
1,35 |
1,38 |
1,37 |
Source : données de la banque Centrale
A la lecture des données figurant dans le tableau ci-dessus, nous constatons que les crédits accordés à l’économie sont en nette croissance, ils sont passés de 993,7 milliards de DA en 2000 à 3585 milliards de DA à la fin 2010. Néanmoins, ils représentent en moyenne 26% du PIB. Un taux relativement faible vu le besoin de financement de l’économie et les ressources dont disposent les banques commerciales. Par ailleurs, cette faiblesse d’intermédiation bancaire est justifiée par la nature des ressources des banques, constituées généralement par des dépôts à court terme, ce qui pose le problème de leurs allocations à un financement à long terme.
La faiblesse du ratio crédit à l’économie/PIB traduit les difficultés rencontrées par les entreprises pour couvrir leurs besoins d’investissement et pour assurer le financement de la croissance économique qui demeure toujours faible, comme le fait ressortir le graphe ci après.
Schéma N°05 : croissance économique

Source : données de la banque Centrale pour les années de 2001 au 2010
Conclusion :
Tout au long de ce travail, nous avons tenté d’apporter des réponses fiable à notre problématique qui s’interroge sur le degré d’adéquation de la conduite de la politique monétaire en Algérie menée depuis l’indépendance avec les objectifs tracés pour chaque période. Ainsi, nous avons essayé de mettre en exergue les différentes mutations qu’a connues la conduite de la politique monétaire et les résultats qu’elle a généré durant les deux dernières décennies. Suite à quoi, nous avons retenus les conclusions suivantes:
De 1962 à 1989(période de planification), on ne peut parler d’une politique monétaire digne de son nom, puisque le système économique relève de la gestion centralisée et planifiée, dont toutes les décisions y afférentes sont prises au niveau national. La monnaie sert comme instrument permettant de réaliser les plans d’investissements. Suite au choc pétrolier de 1986 qui a engendré un déficit budgétaire important, les autorités du pays ont été conduites à adopter des réformes notamment au plan monétaires, ceci a eu lieu à partir de 1990.
Durant la période de transition vers l’économie de marché allant de 1990 à 1999, la Banque d’Algérie a été chargée de mettre en place une politique monétaire visant globalement à rétablir les équilibres internes et externes. Ces derniers n’ont pas été réalisés qu’après l’adoption du PAS négocié avec le FMI, suite à quoi nous les résultats monétaires et financiers ont enregistré une amélioration. Le taux d’inflation est comprimé de 31,62% en 1992 à 2,6 en 1999, les taux d’intérêt ont commencé à baisser et deviennent positifs à partir de 1997. Mais parallèlement, le resserrement de la politique monétaire et la dévaluation du aux de change se sont accompagnés d’une destruction de l’entreprise publique et de la baisse de l’investissement, générant ainsi un taux de croissance très faible (en dessous de 3%). Ces inconvénients qui y sont dérivés, constituent des limites dues au resserrement de la politique économique.
L’évolution de la situation monétaire, durant la période 2000-2011, est confirmée par la poursuite de l’augmentation des avoirs extérieurs qui ont permis au trésor public de se désendetter vis-à-vis du système bancaire, ce qui a engendré des surliquidités. Et pour se prémunir contre l’inflation, la Banque d’Algérie a procédé à l’application de la politique des règles, en ciblant un taux plafond de 3%. Cependant, on voit qu’à plusieurs reprises les taux d’inflations dépassent leurs taux ciblés. Quand aux résultats de la sphère réelle, ces derniers sont loin d’être appréciables.
Comme le montre le taux de croissance économique qui fluctue autour de 3%, et qui est dû principalement à l’incapacité du système bancaire d’accompagner le financement des entreprises publiques et privées, malgré les surliquidités dont dispose ce denier.
Par ailleurs, la réalisation de la prospérité économique et la stabilité monétaire n’est pas une l’affaire de la politique monétaire. Elle doit être aussi accompagnée d’une politique budgétaire qui peut assurer une meilleure allocation des dépenses publiques et une politique de change qui permet de restituer le pouvoir d’achat de la monnaie nationale.
Références bibliographiques
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Définition donnée par le dictionnaire Larousse.
Dominique Plihon, « « la monnaie et ses mécanismes », 3e édition La Découverte, Paris 2003 », p86.
Dominique Plihon, « la monnaie et ses mécanismes », 3e édition La Découverte, Paris 2003, P17.
données tirées des différents rapports de la Banque d’Algérie (2002, 2006, 2009) et rapport du FMI n°11/39,
Henni. A, « Monnaie, crédit, et financement en Algérie (1962-1987 », CRAD, 1987, P35.
http://www.journaldunet.com/business/pratique/dictionnaire-economique-et financier/17261/monnaie-scripturale-definition-traduction.html
Jean-Pierre PATAT, « monnaie, institutions financières et politiques monétaires », 5éme édition ECONMICA, Paris, 1993
Jézabel Couppey- Soubeyran, « monnaie, banque, finance », 1ere édition, Paris, 2010, P214.
loi 90-10 relative à la monnaie et au crédit mars 2011.
ministère des finances. « la situation économique et financière en 2000 ». P41
Mishkin.f , « monnaie, banque et marchés financier », 8e édition, Pearson Education, Paris 2007, p65.
Patat. J , « la monnaie, institutions financières et politique monétaire », 5e édition Economica, Paris 1993, P362
Rapport de CNES, Regard sur la Politique Monétaire en Algérie, 26éme session plénière, 2005, P67
Rapport de la BAFD sur les pays de l’OCDE, « perspectives économique en Afrique », 2007, P122.
rapport de la Banque d’Algérie pour 2005, « évolution économique et monétaire en Algérie », avril 2006, P145